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Analyse des deuxième et troisième articles de la Constitution citoyenne du Québec du 29 mai 2019


Ceci est la deuxième chronique d’une série visant à étudier la Constitution citoyenne du Québec, produite par le mouvement « Constituons ! » et publiée le 29 mai 2019 sur le site de l’Institut du Nouveau Monde :


Nous allons examiner les deuxième et troisième des 21 articles contenus dans le chapitre Un intitulé Des droits et devoirs fondamentaux.


Voici le libellé de ces articles :


1. Chaque personne a droit à l’éducation, y compris l’éducation de base, gratuite et de qualité, à l’éducation à l’environnement et à l’écocitoyenneté ainsi qu’à une éducation politique citoyenne, sans aucune discrimination.


2. Toute personne a le droit d’éduquer ou de confier l’éducation de ses enfants selon la méthode d’apprentissage qui lui convient en autant que l’acquisition des notions de base soit garantie et que cela mène au plein épanouissement de la personnalité humaine et à son intégration harmonieuse dans la société.


Analyse :


Ces articles traitent de l’éducation en tant que droit fondamental.


Il est étonnant de voir apparaître ce droit aussi tôt que la 2e et la 3e position dans la liste des droits du projet de Constitution citoyenne.


Nous pouvons contester ce choix de faire passer le droit à l’éducation avant même :


- les droits à la vie, à la sûreté, à l’intégrité de la personne, à la personnalité juridique et à l’obtention des secours lorsque l’on est en péril, que prend soin d’inscrire la Charte québécoise des droits et libertés de la personne de 1975 en ses articles 1 et 2 ;


- le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, ainsi qu’à déterminer librement leur statut politique et à assurer leur développement que prévoient le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 en leur article premier ;


- l’ensemble des droits que prévoit la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 dans ses 25 premiers articles avant d’arriver presque finalement au droit à l’éducation.


Il serait intéressant de questionner le groupe de citoyens constituants sur ce qui a motivé leur choix de placer l’éducation en place aussi proéminente.


Il est possible que ce soit parce que l’éducation était dans l’air du temps au moment où ils ont rédigé leur projet...


L’éducation avait en effet été promue comme « priorité » lors de la dernière campagne électorale par le parti ayant été élu pour former notre gouvernement actuel.


Nous pouvons aussi contester le fait que les citoyens constituants aient prévu deux articles sur l’éducation plutôt qu’un seul, même s'ils savaient ne pas disposer de beaucoup de temps et devoir couvrir l’ensemble des sujets à prévoir dans une constitution d’État.


En mentionnant que l’éducation de base doit être gratuite et de qualité, ont-ils voulu faire référence à l’enseignement élémentaire et fondamental que prévoit la Déclaration universelle des droits de l’homme ?


Article 26 de la DUDH
1. Toute personne a droit à l'éducation. L'éducation doit être gratuite, au moins en ce qui concerne l'enseignement élémentaire et fondamental. L'enseignement élémentaire est obligatoire. L'enseignement technique et professionnel doit être généralisé ; l'accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous en fonction de leur mérite.
2. L'éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et au renforcement du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle doit favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux ou religieux, ainsi que le développement des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix.
3. Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants.

Il aurait été intéressant de savoir à quel niveau les constituants québécois limitent en 2019 l’éducation de base.


Ce niveau est probablement différent de celui préconisé par les rédacteurs de la DUDH de 1948, qui parlaient d’un niveau élémentaire correspondant à nos écoles primaires; et de celui mentionné dans le PIDESC de 1966, qui requérait la gratuité progressive pour l’enseignement secondaire technique et professionnel.


Article 13 du PIDESC
1. Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à l'éducation. Ils conviennent que l'éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et du sens de sa dignité et renforcer le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ils conviennent en outre que l'éducation doit mettre toute personne en mesure de jouer un rôle utile dans une société libre, favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux, ethniques ou religieux et encourager le développement des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix.
2. Les États parties au présent Pacte reconnaissent qu'en vue d'assurer le plein exercice de ce droit:
a) L'enseignement primaire doit être obligatoire et accessible gratuitement à tous ;
b) L'enseignement secondaire, sous ses différentes formes, y compris l'enseignement secondaire technique et professionnel, doit être généralisé et rendu accessible à tous par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration progressive de la gratuité ;
c) L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration progressive de la gratuité ;
d) L'éducation de base doit être encouragée ou intensifiée, dans toute la mesure possible, pour les personnes qui n'ont pas reçu d'instruction primaire ou qui ne l'ont pas reçue jusqu'à son terme ;
e) Il faut poursuivre activement le développement d'un réseau scolaire à tous les échelons, établir un système adéquat de bourses et améliorer de façon continue les conditions matérielles du personnel enseignant.
3. Les États parties au présent Pacte s'engagent à respecter la liberté des parents et, le cas échéant, des tuteurs légaux, de choisir pour leurs enfants des établissements autres que ceux des pouvoirs publics, mais conformes aux normes minimales qui peuvent être prescrites ou approuvées par l'État en matière d'éducation, et de faire assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants, conformément à leurs propres convictions.
4. Aucune disposition du présent article ne doit être interprétée comme portant atteinte à la liberté des individus et des personnes morales de créer et de diriger des établissements d'enseignement, sous réserve que les principes énoncés au paragraphe 1 du présent article soient observés et que l'éducation donnée dans ces établissements soit conforme aux normes minimales qui peuvent être prescrites par l'État.

Il semble progressiste que les constituants utilisent les concepts d’éducation à l’environnement, à l’écocitoyenneté et à l’éducation politique citoyenne, mais il aurait été nécessaire qu’ils précisent leurs pensées.


Nous reviendrons dans une autre chronique sur l’expression « sans aucune discrimination », qui est utilisée à la fin du deuxième article du projet de Constitution québécoise…


Dévoilons seulement ici qu’elle est probablement à bannir, bien qu'elle ait été utilisée depuis longtemps dans des documents traitant des droits universels.


Dénonçons le fait qu’il semble boiteux que chaque citoyen puisse confier l’éducation de ses enfants selon la méthode d’apprentissage qui lui convient en autant que l’acquisition des notions de base soit garantie.


Il vaudrait mieux préciser ce que l’on entend par « notions de base » à inscrire dans la constitution de notre État, mais donner une certaine liberté à nos représentants politiques pour qu'ils puissent réfléchir plus attentivement aux différentes méthodes d’apprentissage préconisées selon l'époque, lors de leurs travaux parlementaires visant à rédiger des lois ordinaires relatives à l’éducation.


Finalement, puisque des abus de pouvoir préjudiciables peuvent survenir en milieu scolaire à tous les niveaux, il serait peut-être indiqué que notre constitution prévoit des protections pour encadrer la liberté académique qui est actuellement prônée d'une manière absolue au niveau de nos universités.

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